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Autrice : Céline Laurens
Illustrateur : Laurent Simon
Maison d'édition : Seuil Jeunesse
Collection : /
Nombre de pages : 56
Date de parution : Septembre 2020
Le narrateur de cet album est fils unique et fier de l’être ! C’est vrai quoi, quand on a un super ami imaginaire, des copains avec lesquels s’amuser et des parents qui nous gâtent et ne s’occupent que de nous, pourquoi voudrait-on bousculer tout ça ? Parce qu’avoir un petit frère ou une petite sœur, c’est plutôt pénible ; le jeune garçon qui nous parle à travers le livre a pu le constater plusieurs fois.
Tout d’abord, il y a son copain Léon… Léon n’est pas encore grand frère, mais il va bientôt le devenir. Et ce changement provoque chez lui une crise existentielle. Il a peur de devoir partager ses jouets, de ne plus être le centre de l’attention, d’être moins aimé. Ses parents ont beau lui dire qu’il aura enfin quelqu’un avec qui s’amuser, il n’en est pas convaincu. Et puis, comme le rajoute le narrateur, pourquoi Léon aurait-il besoin d’un camarade de jeu alors qu’il a déjà de super amis ?!
Ensuite, il y a Hippolyte. Hippolyte, c’est un martyre, car non seulement il a une sœur, mais en plus, elle est née en même temps que lui. Le pauvre n’a donc jamais pu être tranquille… Puis, il faut dire que sa sœur lui complique vraiment la vie. Elle le prend pour cible lors des soirées pyjama qu’elle organise avec ses copines, elle se dispute en permanence avec lui, fait des crises pour choisir les films au cinéma, l’oblige à partager sa fête d’anniversaire, et tant d’autres choses encore. Pire : depuis qu’elle est allergique au chocolat, lui non plus ne peut plus en manger ! Non, non, avoir une sœur n’a rien de drôle !
Le narrateur n’a peut-être ni frère ni sœur, mais il a un ami imaginaire avec lequel il s’invente des tas d’histoires. Et il a aussi une baby-sitter, même s’il s’en passerait bien. D’ailleurs, sa baby-sitter est justement à la maison. Elle a été appelée pour le garder le temps que ses parents se rendent à l’hôpital.
C’est étrange qu’ils s’y rendent un dimanche… et avec des valises en plus !
Mais à bien y réfléchir, c’est sans doute mieux, car cela fait quelque temps que ses parents se comportent bizarrement. Sa maman semble souffrir d’une intense fatigue accompagnée d’une sacrée prise de poids. Quant à son papa, il s’est pris d’une nouvelle passion pour le bricolage et transforme la chambre d’amis… Et puis il y a leurs sourires et leurs messes-basses. Le petit narrateur les a entendus parler d’une surprise en préparation. Il en est sûr, il va enfin recevoir le train électrique qu’il demande depuis longtemps en essayant de culpabiliser ses parents de le laisser fils unique… alors qu’en fait, il aime tellement ça !
Et pourtant… ce n’est pas un train électrique que le narrateur trouvera dans le landau qui accompagne ses parents lors de leur retour de l’hôpital… mais un petit bébé !
Notre avis :
Fils unique et fier de l’être est un livre original qui traite avec beaucoup d’humour et de second degré de la naissance d’un nouvel enfant et de son acceptation par la fratrie qui le précède.
Ce livre convient autant aux enfants uniques qu’à ceux qui ne le sont pas (ou plus pour longtemps).
Les enfants qui ont des frères et sœurs se retrouveront certainement dans les situations jugées pénibles par le narrateur. Celles-ci étant décrites avec humour, ils s’en amuseront et apprendront même peut-être un peu à les relativiser.
Quant aux enfants uniques, ils se plairont beaucoup à passer en revue tous les inconvénients liés au statut de frère ou sœur et ne pourront qu’être d’accord avec le narrateur lorsqu’il affirme qu’il n’y a rien de pire que de devoir partager les jouets reçus du Père Noël !
Mais ce qui amuse le plus les jeunes lecteurs, c’est de comprendre qu’il se passe quelque chose en arrière-plan de l’histoire racontée par le narrateur. Au fur et à mesure des pages, progressivement, ils découvrent de plus en plus d’indices qui indiquent tous une seule et même vérité : aussi convaincu qu’il puisse paraître, le narrateur sera bientôt projeté au rang de grand frère.
Plus on avance dans la lecture, plus le déni du narrateur est flagrant. Malgré son ami imaginaire qui redouble de messages et de moqueries (car il a bien compris la situation, lui !), malgré le ventre de sa maman qui enfle démesurément, malgré la chambre d’ami transformée en chambre de bébé, et malgré la réapparition des jouets pour nourrisson, le petit héros de cette histoire refuse de voir la réalité en face ! Ce décalage entre la compréhension du narrateur et celle de l’enfant qui lit le livre suscite plaisir et amusement chez le lecteur.
Omniprésents, l’humour et le second degré sont utilisés par Céline Laurens pour dédramatiser toutes les situations potentiellement sensibles, de la fatigue de la maman en passant par l’obligation de partager les jouets, l’espace de vie et l’attention. Et si le statut d’enfant unique est présenté comme plus agréable, on comprend vite que celui de frère ou de sœur présente lui aussi des atouts.
Enfin, terminons par quelques mots à propos des illustrations de Laurent Simon. Les couleurs vives (voire fluo !) s’associent aux traits nets et plus foncés pour donner aux dessins un petit air de bande dessinée. Les personnages sont particulièrement expressifs et ont le chic pour traduire en image l’humour qu’on lit dans le texte. L’ensemble est résolument moderne et dynamique !
Fils unique et fier de l’être, c’est donc un album assurément drôle, parfait pour ouvrir la discussion et permettre de parler dans la bonne humeur de l’accueil d’un éventuel petit frère ou petite sœur.